Développement de l'enfant

Marre de voir vos enfants frustrés crier ou pleurer parce qu’ils se sentent dépassés par leurs émotions ? Envie de respirer et de leur offrir un monde un peu plus accueillant et serein ? Peu importent les motivations, de plus en plus de parents et de pédagogues se mettent à écouter les enfants, vraiment. Et leur apprennent à exprimer leurs émotions avec des mots, des cartes ou des chansons.
Une folle course de poussettes est lancée dans cette classe de 1re maternelle d’une petite école bruxelloise. Ça roule, les enfants courent, rigolent, se bousculent un peu. Jusqu’à ce que cette joyeuse cacophonie soit déchirée par un hurlement, un cri strident, agrémenté de pleurs en fontaine qui émanent du petit Timéo, rouge comme un rubis.
Nous, on l’a vue, la petite nénette qui lui a piqué sa poussette. L’institutrice aussi. Et sa réaction ne tarde pas : « Alia, je crois que Timéo veut te dire quelque chose. Timéo, peux-tu utiliser des mots pour expliquer à Alia ce que tu vis ? ». Et le petit de bredouiller quelques phrases pour expliquer les émotions qui le traversent. C’est tout. L’instit’ n’a pas crié ni menacé, elle a juste tendu l’oreille et ouvert le dialogue. Ça a l’air tout simple, comme ça, d’apprendre à un enfant à dire ce qu’il ressent. Et cet apprentissage lui servira toute sa vie.
Pour aider un enfant à exprimer ses émotions, il faut d’abord accepter que son enfant puisse être joyeux, triste ou en colère. Accepter son émotion et l’entendre pour lui permettre ensuite de passer à autre chose. « Les émotions passent comme des nuages dans le ciel, nous explique une prof de yoga pour petits. On peut apprendre à un enfant à les regarder passer, à les nommer sans trop se laisser emporter par elles ».
Des outils à inventer
Et pour arriver à cette étape, des outils sont parfois bienvenus. Julie a par exemple créé une roue des émotions qu’elle a affichée dans sa classe de 3e maternelle à la rentrée. « J’y ai dessiné quelques visages très expressifs et chaque enfant est invité, en début de journée, à placer sa photo dans la zone correspondant à son humeur : heureux, fatigué, triste, en colère ou joyeux. Souvent, ils se mettent dans la case du bonhomme souriant, mais pas toujours. Et ça permet parfois des chouettes échanges. J’ai l’impression que quand un enfant peut mettre des mots et être reconnu dans son émotion, il se sent déjà un peu mieux. Et ce qui est trop mignon, c’est de voir la réaction des autres quand un enfant ne va pas bien. Ils ont des petits gestes affectueux, certains proposent leur doudou à prêter ou un câlin ».
« Chez nous, on a une chanson réconfort qui aide à retrouver le calme avant de discuter, raconte Arabelle, maman de Solal, 4 ans. C’est une chanson dont j’ai changé les paroles quand mon aîné était bébé. Une sage-femme proposait d’insérer une petite chanson réconfortante lors du bain ou d’une séance de massage. Ça fait un peu conditionnement de lui dire ‘Lalalala, tout va bien’ en lui massant ses jambes. Mais comme le massage est introduit quand l’enfant est zen et détendu, cette mini-chanson est associée à quelque chose de positif. Et il m’est déjà arrivé d’y avoir recours en cas de crise pour réconforter mon fiston. »
Point commun des différentes méthodes : il faut anticiper, préparer ces petits remèdes à l’avance, lors d’un moment de calme et de plaisir pour pouvoir s’en servir dans des moments de tempête.
E. W.
En pratique
Quelques outils pour les petits
Côté bouquin, quatre vrais coups de cœur à partager :
- La couleur des émotions, très beau livre en 3D d’Anna Llenas paru aux éditions Quatre Fleuves. Un gros monstre est tout embrouillé par ses émotions. Il ne s’en sort pas. Son amie à couettes vient l’aider à faire le tri. Et couleur par couleur, elle décortique avec lui différentes émotions.
- Un petit chat furieux, d’Audrey Bouquet et Fabien Öckto Lambert aux éditions Langue au chat. Ce mini-bouquin nous propose une histoire qui sent le vécu à plein nez : un petit chat n’entend pas le coq chanter le matin et se réveille de très mauvais poil… il râle, tire la langue… jusqu’à ce qu’il prenne un peu de temps pour souffler. On a lu cette histoire à une adorable grincheuse du matin. Elle l’a adoré.
- La poétique histoire du Petit Nuage Gris, de Coralie Ramon. C’est l’histoire d’un nuage qui ne sait pas voler. Un lapin, un Indien et une fillette tenteront de l’aider. Mais c’est en lui, du côté de ses émotions qu’il trouvera la solution. L’auteure (belge !) de ce livre a pensé à y insérer une roue des émotions bien pratique. À commander via la page Facebook de l’auteure : PetitNuageGrisCoralieRamon.
- Le classico-super Grosse colère de Mireille d’Allancé, paru à L’école des loisirs. On le trouve déjà dans de nombreuses classes. Si votre enfant ne l’a jamais lu, filez l’emprunter à la bibliothèque et découvrez cette grosse colère rouge qui prend de plus en plus de place avant de devenir toute riquiqui.
Pour les plus grands
Côté jeux, on a déniché deux jeux de cartes dédiés aux émotions et sensations. Pour les plus jeunes, on commencera à jouer avec trois-quatre cartes en fonction des émotions qu’ils connaissent et peuvent déjà nommer.
- Le langage des émotions, jeu très complet et joliment illustré au féminin et au masculin, édité par la Fédération des centres pluralistes de planning familial. Il est vendu dans certaines librairies, centres de planning familial ou au siège de la Fcppf, à Ixelles (78 cartes, 10 €).
- Les Emoticartes ® permettent aussi aux enfants de jouer avec les émotions, de les reconnaître, de les nommer et peut-être même de les dépasser grâce à des exercices proposés. On peut y jouer en famille, mais plutôt avec des enfants de primaire. Avec une extension web en prime.