Vie pratique

Quand l’enfant joue les Calimero

Le psychanalyste Saverio Tomassella, auteur d’un ouvrage intitulé Le Syndrome de Calimero (Albin Michel), livre des pistes à l’attention des parents confrontés à un enfant qui râle fréquemment. Il nous aide à décrypter ce que cachent parfois ces plaintes et évoque les écueils à éviter.

Comment réagir quand notre enfant, à l’instar de Calimero, a tendance à se plaindre trop fréquemment ?
Saverio Tomassella
 : « La meilleure attitude consiste à dédramatiser. Si on commence à se plaindre de son enfant qui se plaint, alors c’est une plainte sans fin… Mieux vaut employer l’humour, faire remarquer à son petit qu’il s’est déjà plaint de la même chose le matin même ou la veille. Il ne s’agit pas de le lui reprocher mais d’attirer son attention sur ce fait. Car lui-même ne s’en rend pas forcément compte. Ensuite, il faut avoir en tête qu’un enfant ne se plaint généralement pas pour rien. Du coup, sa plainte représente souvent une énigme pour les parents. Pour tenter de la percer et savoir si quelque chose l’attriste ou s’il est confronté à une interrogation qu’il n’ose pas exprimer ou ne parvient pas à formuler, il est souvent utile de poser des questions légères, en décalage avec son objet : ‘Cela s’est bien passé à l’école ? Tu te sens fatigué ?’. Enfin, il est rare qu’un enfant soit râleur sans qu’au moins un de ses deux parents le soit aussi. Il faut donc se demander si, soi-même, on n’a pas un peu trop tendance à se plaindre et s’il ne faudrait pas, le cas échéant, se plaindre auprès d’autres adultes plutôt qu’auprès - ou en présence - de ses enfants. Il faut en effet éviter que ces derniers n’en viennent à considérer la plainte comme un mode de communication, voire un mode de relation. »

Que peuvent cacher les plaintes ?
S. T. : 
« Il y a parfois de bonnes raisons de se plaindre et il ne s’agit pas d’évacuer la plainte : quand l’enfant a froid, a faim, a envie d’aller aux toilettes, etc. Tout cela relève de besoins vitaux. Il y a là un fondement concret, réel, dont on a besoin de tenir compte. Dans d’autres cas de figure, la plainte légère, portant sur des éléments en apparence anodins, exprime en réalité une souffrance plus profonde, dont l’enfant n’a pas toujours pleinement conscience, comme le sentiment d’être moins aimé que les autres membres de la fratrie. De même, un enfant qui revient de l’école et nous dit qu’il en a marre des transports, des bus en retard, vit peut-être douloureusement ses relations avec un professeur. Il a peut-être été grondé, a reçu de mauvaises notes, se sent découragé, mais n’ose pas le dire… »

Vous montrez aussi dans votre livre qu’une plainte, qui aux yeux des autres semble sans signifiance, fait en réalité écho à une situation vécue douloureusement dans le passé, notamment durant la prime enfance…
S. T. : 
« Oui, la raison la plus profonde de la plainte est parfois la peur de l’abandon, celle de ne pas être soutenu. La situation dont on se plaint peut de fait nous renvoyer à une autre situation, plus ou moins grave, vécue quand on était tout petit, et dans laquelle on a eu l’impression d’être délaissé ou abandonné, avec un sentiment de faiblesse, de désarroi, voire de désespoir. La plainte peut être le reliquat d’une telle détresse, détresse ravivée par la première relation amoureuse ou le divorce des parents, par exemple. Un élément extérieur vient de fait réactiver notre mémoire de jeune enfant. Il ne s’agit pas pour les parents d’aller creuser dans cette direction, mais d’avoir en tête que cela peut expliquer des plaintes à répétition de la part de notre enfant. »

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